Naufrage de “La Janny”

Le lundi 24 octobre 1892, vers six heures du matin, les chaloupes de pêche Saint-Yves et Janny, quittaient le 4ème bassin du port de commerce, se rendant à la pêche. Le temps était beau. Les deux chaloupes, après avoir stationné quelque temps dans le chenal, se dirigèrent vers les Blancs-Sablons, où la Janny arrivait vers midi, et le Saint-Yves vers une heure. Vers quatre heures du soir, les deux chaloupes quittèrent les Blancs-Sablons et firent route sur Brest, lorsqu’à sept heures, elles furent surprises par une violente tempête, en face du grand Minou.

Le Saint-Yves, qui avait perdu de vue la Janny une demi-heure après le départ des Blancs-Sablons, la retrouva à dix heures du soir. Quelques instants plus tard la Janny sombrait. On suppose que, voulant éviter la tempête, la chaloupe se sera réfugiée dans un renfoncement près du Minou où les bateaux de Loperhet chargent le sable. Cet endroit est réputé très dangereux. C’est là que l’année dernière, le 14 avril, trois cotres de Loperhet se sont brisés, ce qui causa la mort de quatre hommes. De son côté, le Saint-Yves éprouvait de graves avaries ; son gui était cassé et son ancre perdue. Le patron, gravement blessé à l’œil gauche par la chute du gui, réussit, néanmoins, à sauver son bateau, et rentrait au port de commerce.

Inquiète de l’absence prolongée de son mari, la femme du patron de La Janny télégraphia à Camaret, puis au Conquet. De ce dernier port, on lui répondit qu’on avait bien vu son mari, mais qu’on ne savait vers quel endroit il s’était dirigé. En présence de ces nouvelles, qui ne la rassuraient guère, elle envoya son fils aîné, âgé de 16 ans, accompagné de deux amis, jusqu’au Minou. Parti à deux heures, le jeune homme arrivait au Minou à 4 h 1/4. Là, après de minutieuses recherches, il trouva le bateau de son père, coulé entre deux roches. Il put même lire l’immatriculation de la chaloupe. Le mât était brisé, et de nombreux débris, ainsi que les sabots du patron flottaient sur les vagues.

Une semaine plus tard, le maire de Plouzané informait la gendarmerie de Saint-Renan qu’un cadavre avait été trouvé sur la grève du Minou. C’était le corps d’un homme paraissant âgé de 50 ans environ, d’une forte corpulence, portant une chemise de coton bleu, au cou un foulard de soie noire avec raies blanches, une flanelle, un pantalon de drap noir. A l’exception de la flanelle, qui était marquée de l’initiale P…, les effets ne portaient aucune marque. Un ouvrier ajusteur au port, qui travaillait momentanément au fort du Minou, a parfaitement reconnu le corps d’un marin de La Janny.

Quinze jours plus tard on a trouvé, au cinquième bassin du port de commerce de Brest, le corps du patron de la Janny. Il est extraordinaire que le soit revenu au port, le Minou étant distant d’au moins trois mille marins et les courants du goulet entraînant d’ordinaire au large. Le corps était rongé par les crabes. Il a été transporté à l’hôpital civil.

(sources : La dépêche de Brest du 28/10/1892 et du 01/12/1892)

Vous trouverez un article intéressant sur les modèles de chaloupe de pêche utilisées en rade de Brest au 18ème et au 19ème siècle par ici.

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